Accueil > Equipes > Acides nucleiques
Le répertoire dynamique de l'ADN-B
Figure 1 : Dans l'ADN-B, les groupements phosphate sont en équilibre entre deux conformations, BI et BII, dont nous avions montré que les populations sont aisément quantifiables expérimentalement à partir des déplacements chimiques du phosphore.
A l'heure actuelle, nous travaillons sur une série d'ADN de 12 paires de base, qui dérivent d'une séquence très favorable à la formation du nucléosome et qui contiennent une large variété de dinucléotides. Sur la base des seuls observables RMN (déplacements chimiques du phosphore, distances inter-protons et Constantes de Couplage Dipolaire Résiduelles 1H-13C ), nous avons démontré en solution les couplages entre états du brin phosphodiester, paramètres hélicoïdaux et taille des sillons, ainsi que la modulation de l'amplitude des variations conformationnelles par la séquence. Nous avons également tiré parti de ces mêmes données RMN pour montrer que deux champs de force très récents, CHARMM36 et Parmbsc, ont une capacité prédictive bien supérieure à leurs prédécesseurs. Le réalisme croissant des dynamiques moléculaires nous a ainsi permis d'accéder à des propriétés des ADN qui échappent aux expériences.
Enfin, nous avons très récemment abordé par RMN l'étude des mouvements lents (de l'ordre de la milliseconde) dans l'ADN, fort peu examinés jusqu'alors, en mettant au point des expériences de dispersion de relaxation en collaboration avec l'équipe de RMN de Gif/Yvette. Nous avons ainsi observé des équilibres conformationnels de deux types, spécifiques à un segment de séquence très particulière, riche en paires de bases A:T (bases indiquées en rouge dans la Figure 2).
Figure 2
Notre but est maintenant de mieux caractériser la thermodynamique de ces équilibres, en particulier de quantifier les populations des conformations en présence. Il faudra également donner une identité structurale à ces conformations, en utilisant plusieurs types de modélisation, dynamiques moléculaires, calculs de modes normaux et calculs quantiques. Cette dernière démarche devrait nous en apprendre plus sur un possible effet de séquence sur les mouvements lents.
L'effet de la séquence de l'ADN sur la formation et la stabilité du nucléosome
Le nucléosome représenté sur cette Figure 3 est l'unité élémentaire de la compaction de l'ADN dans les cellules eucaryotes. Cette particule est formée par un ADN de 145-147 paires de bases enroulées autour d'un cœur de 8 histones.
Les nucléosomes contrôlent l'accessibilité du double brin d'ADN et sont donc directement impliqués dans de très nombreux processus nucléaires. Le positionnement du nucléosome le long des génomes, hétérogène et modulable, dépend de nombreux facteurs et n'est pas encore bien compris. Notre ambition est de fournir un cadre structural et rationnel pour comprendre comment la séquence de l'ADN, qui détermine ses propriétés intrinsèques, contribue à la formation et la stabilité des nucléosomes.
Les travaux présentés dans le paragraphe précédent, dédiés à l'ADN libre, nous ont conduits à faire l'hypothèse qu'une périodicité adéquate en termes de mouvements des phosphates et de largeur du petit sillon était cruciale pour favoriser la formation du nucléosome. Pour valider cette proposition et pour aborder la stabilité du complexe, nous étudions une série de nucléosomes constitués avec différentes séquences d'ADN, connues pour stabiliser ou déstabiliser ces complexes nucléoprotéiques. Nous utilisons ici des approches de modélisation pour sonder mouvements locaux (dynamique moléculaire) et collectifs (calculs des modes normaux) du nucléosome à différentes échelles de temps. Une approche originale basée sur les partitions de Delaunay-Laguerre permet de décrire la topologie (compacité, interfaces...) des nucléosomes en termes de cellules et de graphes.
Nous évaluons ainsi l'état de tension de l'ADN nucléosomal, lié à la stabilité de l'interface ADN- histones ; nous sondons avec attention les interactions entre l'ADN et les parties N-terminales des histones, peu structurées, qui sont les cibles de modifications épigénétiques déstabilisant le nucléosome pour une raison encore inconnue ; enfin, nous observons les mouvements de l'ADN qui tendent à fragiliser l'interface.
Cette thématique est réalisée en collaboration avec Christophe Oguey (Université de Cergy-Pontoise), David Perahia (LBPA) et l'équipe de Claude Nogues (LBPA).